Si les blogueurs, instagramers et youtubers font partie du décor social média & digital depuis des années, ils sont devenus la coqueluche des marques depuis deux ou trois ans. Cette année le salon VEM consacre un atelier spécial à cette thématique des influenceurs, en pleine ébullition. Nicolas de Dianous, directeur associé de l’agence We Like Travel vous propose de faire le point dans cet article, avant de développer le sujet  lors de l’atelier M27 vendredi 16 février à VEM. Inscrivez-vous ici !

Quel est le contexte ?

Les marques, du prêt à porter au maquillage, en passant par le tourisme et le matériel high tech, vivent toutes une hyper-complexification de leur présence numérique :

  • Les comportements des clients se digitalisent et créent un embouteillage publicitaire sur les médias numériques : le temps passé sur le web dépasse celui de la TV (4H07 vs. 3H51 par jour en 2018) faisant d’Internet le premier média consommé par les Français, les Britanniques ou encore les Allemands. Dans le sillage de cette tendance, et pour la première fois en 2017, les investissements publicitaires digitaux dans le monde entier ont dépassé ceux de la télévision. Les annonceurs se bousculent entre campagnes display, annonces Google, et autres activations social media, qui provoquent un sentiment de saturation des consommateurs qui n’ont jamais été aussi sollicités. En témoigne la forte utilisation de bloqueurs de publicités (presque 1 internaute sur 3 en 2018).

 

  • En parallèle, la consommation de média s’éparpille désormais sur toute la journée d’un internaute grâce à son smartphone: ce smartphone dépasse l’ordinateur dans un usage Internet classique, et l’écrase littéralement dans un usage social media. 80% des utilisateurs de Facebook s’y connectent sur mobile et ordinateur, et 40% exclusivement sur mobile. Sans parler de Snapchat et Instagram où l’on frise le 100% d’utilisation mobile-only. Là encore, ce morcellement de l’attention quotidienne, associé à un terminal mobile dominant sont une contrainte technique et philosophique que les marques ont du mal à appréhender, tant du côté de la séduction que de la conversion.

 

  • Les marques qui ne parviennent pas à se rendre intéressantes sont durement pénalisées par les algorithmes des réseaux sociaux, et voient leurs audiences organiques chuter malgré des investissements en forte hausse. Authenticité, proximité… être performant est de plus en plus contraignant, et nécessite créativité + budgets d’amplification pour gagner la bataille de l’attention. Mais au-delà de l’attention, c’est bien de l’engagement qualitatif et conversationnel que souhaite Mark Zuckerberg en complexifiant encore la visibilité des marques sur Facebook. Le tourisme fait heureusement plutôt exception, étant intrinsèquement un sujet plaisir pour les utilisateurs des réseaux sociaux. Nous avons développé ce point dans cet article.

 

  • Enfin, il n’y aura jamais de meilleur prescripteur qu’une personne de confiance, qu’elle soit un proche ou un expert. La domination des sites d’avis montre le besoin des clients d’avoir des recommandations utiles. Le fameux conseil éclairé et positif ! La marque doit amplifier ce message positif émis par une personne de confiance, et non tenter de l’émettre elle-même car elle ne serait pas crédible.

Pour toutes ces raisons, les marques sont en 2018 plus que jamais à l’affût de nouveaux leviers d’audience et d’amélioration de leur e-réputation. Sans être une solution miracle, les campagnes influenceurs performantes (et elles ne le sont pas toutes !) pallient de nombreux problèmes de crédibilité, de proximité, d’audience et d’émotion.

Les influenceurs sont un puissant levier de visibilité et de recommandation

Si l’on reprend les problématiques ci-dessus, il faut bien avouer que la collaboration avec des influenceurs a tout pour plaire sur le papier. Les bémols existent et je les aborde plus bas, mais ne boudons pas notre plaisir à lister de solides arguments en faveur de la collaboration avec des influenceurs :

  • Ils sont aimés et imités: c’est certainement par là qu’il faut commencer. Les blogueurs / influenceurs ont bâti leurs communautés autour de leur univers, de leur ton, de leur vie personnelle. Certains sont suivis pour leurs récits sincères, d’autres pour leurs photos magnifiques, d’autres encore pour leur capacité à nous divertir avec humour. Leur influence n’est pas un fantasme : 31% des utilisateurs de médias sociaux interrogés dans une étude ont déclaré avoir déjà acheté un produit ou un service après l’avoir repéré dans la publication d’un influenceur.

 

  • Ils sont performants et surprenants: là où les marques peinent parfois à être vues de leurs fans et de leurs abonnés, les blogueurs / instagramers / vloggers touchent globalement très bien leurs communautés, et génèrent des interactions de qualité. Ils disposent d’une audience souvent importante, et surtout ciblée sur des thématiques utiles pour la promotion touristique. Leur regard diffère, leur point de vue enrichit souvent la marque avec laquelle ils s’associent. Et lorsqu’il est bien défini et mesuré, le retour sur investissement de la collaboration est généralement très bon, avec un coût au contact + une qualité de recommandation difficiles à égaler.

 

  • Ils produisent des contenus: sans être tous des photographes ou réalisateurs de génie, les influenceurs produisent des photos et des vidéos d’un niveau de qualité globalement très bon. Une simple balade sur Instagram suffit à mesurer les efforts qui sont faits pour séduire et engager leurs communauté. Le live et les stories sont également très populaires, et correspondent parfaitement à leur aptitude à prendre la parole, souvent face caméra. Au-delà de la diffusion sur les canaux de l’influenceur, ces contenus sont potentiellement réutilisables sur les réseaux sociaux de la marque (à négocier), et notamment dans le tourisme. C’est un argument de poids quand on connait la dépendance aux contenus des entreprises sur les réseaux sociaux (dans le tourisme : besoin de 200 à 400 nouveaux contenus par an si on veut bien faire les choses !), et la nécessité d’avoir des contenus inspirants et générateurs d’engagement.

 

Les problématiques de cet emballement : des excès, et un manque de culture du résultat

La monétisation : les blogueurs & influenceurs sont aujourd’hui sur-sollicités par les marques. Les plus connus reçoivent des dizaines de demandes de partenariats chaque jour, et sont devenus des professionnels de ce qui était (rappelons-le) une passion au départ avant tout. La monétisation des contenus produits, la monétisation d’une simple présence, sont désormais légion.

Le problème, c’est que 86% des marketers avouent ne pas savoir comment évaluer la collaboration avec un influenceur, et donc évaluer sa rémunération. De là à payer tout et n’importe quoi à un prix délirant il n’y a qu’un pas. Avant de dépenser 500 000 $ pour un post sponsorisé sur l’Instagram de Kim Kardashian, il faut se poser les bonnes questions sur le ROI de chaque collaboration, et du véritable impact de l’influenceur sur le client final.

La triche : Il parait qu’on ne peut pas tromper 1000 fois 1000 personnes. Il faut pourtant croire que si, quand on constate le nombre de blogueurs, d’instagramers et d’autres influenceurs qui collaborent avec des marques prestigieuses sur la base d’une audience purement et simplement truquée. Oui : fausse. Achetée à grands renforts de robots turcs, russes ou pakistanais qui gonflent les compteurs de fans, d’abonnés, de likes, de vues… en toute impunité. Une marque qui collabore avec ce type de personne bénéficiera d’un beau reporting excel avec des chiffres solides, en n’ayant pourtant touché personne.

Pas d’alarmisme, mais pas d’angélisme : collaborer avec des influenceurs nécessite avant tout de vérifier que leurs audiences soient réelles et engagées. Comment les détecter ? croissances improbables, ratio following/followers déséquilibré, interactions louches et répétitives… Nous développerons ce sujet lors de l’atelier ! D’ici là, je vous invite à lire The Follower Factory : une enquête hallucinante sur l’achat de followers par des célébrités, menée par le New York Times. Les lignes bougent, et le placement produit est lui aussi de plus en plus encadré.

 

Exemple d’un compte Instagram pratiquant délibérément la technique du growth hacking, à l’aide de robots peu regardants sur la qualité des abonnés gagnés.

 

Les divas : Tomber sur un blogueur / une blogueuse diva, c’est une crainte fondée mais cela reste une situation rare. Sur 120-130 opérations influenceurs réalisées par We Like Travel ces dernières années, nous n’avons été confrontés que deux ou trois fois à un influenceur problématique. Comme certains journalistes, quelques-uns ont pris leurs aises et ont oublié les fondamentaux du savoir-être et de la déontologie lorsqu’ils collaborent avec une marque. Peu de posts et de visibilité, attitude désinvolte, manque de professionnalisme… cela peut arriver si l’on ne fait pas un casting précis, qui nécessite une bonne connaissance de l’écosystème de l’influence marketing. Les égos surdimensionnés sont une perte de temps : nous verrons lors de l’atelier comment les gérer ou mieux, comment les éviter.

 

via GIPHY

Être satisfait et mesurer ses résultats :  Qu’on sollicite des « petits » instagramers locaux ou de célèbres blogueuses mode,  le succès d’une collaboration réussie repose sur une approche sincère des deux parties, qui s’entendent sur un deal (produits gratuits contre visibilité, contenus contre rémunération, etc.) après avoir fait connaissance. La mauvaise approche génère de mauvais résultats : le sur-mesure et la personnalisation d’une collaboration sur la durée gagneront toujours face à l’automatisation d’un partenariat « one shot », sans vision. De la qualité oui, avec une audience ciblée et de beaux contenus, mais aussi de la quantité, car l’arbre des contenus ne cache pas toujours une forêt de recommandations. Il faut suivre :

  • Le nombre de posts et l’audience touchée,
  • La qualité des posts et leur capacité à transmettre le message dont vous avez besoin,
  • La qualité des contenus, leur esthétique et leur capacité à être réutilisés,
  • Les interactions basiques sur les posts (j’aime, réactions…),
  • Les commentaires plus fournis et les impressions des personnes exposées,
  • Et d’autres indicateurs à découvrir lors de l’atelier.

 

Du macro au micro : pas besoin d’avoir 100 000 abonnés pour avoir de l’influence

Certaines marques misent sur le VIP marketing en s’appuyant sur 2 ou 3 célébrités. D’autres marques, de plus en plus nombreuses, sollicitent un large panel de petits influenceurs ciblés.

C’est la tendance et c’est aussi la thématique centrale de l’atelier M27 à Saint Raphaël : comment l’équipe marketing d’une structure touristique, et notamment son community manager, peut collaborer avec une large palette d’influenceurs, et notamment de micros-influenceurs.

Un micro-influenceur, c’est quoi ?

  • On parle de micro-influenceur lorsque la taille de la communauté de l’influenceur est restreinte. Certains avancent le chiffre de 500 à 50 000 abonnés (pour Instagram par exemple, notamment aux USA). D’autres le plafonnent à 10 000 abonnés en Europe.
  • Le constat, c’est que ces influenceurs-là sont généralement plus proches de leurs communautés, ont conservé un mode de vie simple et une authenticité aujourd’hui perdue chez les influenceurs stars. Grâce à cette proximité et à cette spontanéité, leur audience n’a pas subi la lassitude des partenariats à répétition et d’un quotidien inaccessible.
  • Les chiffres de l’engagement ne trompent pas : certains micro-influenceurs avec 10 000 abonnés touchent parfois plus de personnes que d’autres avec 100 000 abonnés. L’engagement sur leurs posts est souvent doublé, triplé, quadruplé. Ici, on parle bien d’un engagement qualitatif (commentaires, partages) plus que de simples réactions comme les likes. La mesure de cet engagement profite aux micro-influenceurs.
  • Les micro-influenceurs sont également moins sollicités, et donc moins gourmands dans leur approche avec les marques. La plupart collaborent sous forme d’échange de visibilité.

 

On y va à fond alors ?

Ce n’est pas aussi simple que cela. Trois problématiques complexifient un peu l’approche de la micro-influence :

  1. Le premier obstacle, c’est la marque elle-même, ou plutôt ses décideurs. Pour l’avoir vécu, il est parfois difficile de faire passer le message qu’on préfère collaborer avec 3 influenceurs à 10 000 abonnés, plutôt qu’une tête d’affiche à 300 000. Les chiffres d’engagement seront peut-être meilleurs avec les 3 micro-influenceurs, mais cette interprétation n’est pas toujours comprise. Il faut « envoyer du gros » et montrer plein de zéros dans les bilans marketing. Nous sommes nombreux à affirmer nos convictions sur ce point et cela tend heureusement à changer.
  2. Le second obstacle, c’est la complexité de gestion d’un nombre plus important de micro-influenceurs. C’est l’effet « longue traine », qui demande beaucoup d’énergie pour superviser un nombre élevé de petites collaborations. Des plateformes automatisées existent mais sont surtout dédiées à la valorisation de produits, plus que des prestations touristiques. Leur approche transactionnelle évoquée plus haut, me semble peu adaptée au secteur du voyage.
  3. Enfin, si la recherche d’impact et de viralité est au cœur du dispositif, les micro-influenceurs ont leurs limites et les empiler ne permettra pas toujours d’atteindre le talent et la force de frappe d’un « macro » influenceur.

 

Qui inviter ? comment les choisir et les approcher ? Que leur proposer ?

L’enveloppe budgétaire disponible décide souvent à votre place, au profit des micro-influenceurs. Au-delà de cette contrainte, faire ses premiers pas dans le marketing d’influence avec des micro-influenceurs ne sera jamais une erreur.

Il n’en demeure pas moins qu’il faut les trouver, les sélectionner, et les proposer une collaboration.

Dans d’autres cas, il faut répondre à des sollicitations entrantes parfois difficiles à évaluer, tant les micro-influenceurs sont nombreux.

Enfin, il faut leur proposer un programme séduisant :

  • Dans le tourisme, un séjour sur place constitue la majorité des collaborations proposées,
  • Ce séjour peut se transformer en idylle comme en cauchemar en fonction de la qualité de l’organisation, de l’originalité des expériences à vivre, et du rythme imposé à l’influenceur, qui ne doit pas être assommé par un programme surchargé.

 

Et les super clients, dans tout ça ?

Amazon n’a pas attendu notre question pour y apporter une réponse : les super clients bénéficient depuis 2016 du Amazon Influencer Program, qui permet de gagner de l’argent grâce à son audience, aussi petite soit-elle. Par super clients, sont entendus les gens qui ont un pouvoir de prescription grâce à leur communauté sur Facebook, Instagram, Twitter ou YouTube. Cela peut donc être n’importe quelle personne qui souhaite s’investir dans cette démarche de recommandation de produits à travers ses publications. Des réunions Tupperware en version social media, en quelque sorte.

La démarche doit nous inspirer pour le tourisme : qui peut mieux commercialiser une destination ou une offre que des clients satisfaits ? Ce sont eux les connaisseurs et les prescripteurs. Pourquoi ne pas les récompenser s’ils apportent du business à une destination, à un office de tourisme, ou encore à un hôtel ?

La société iAdvize a bien compris le potentiel de ces prescripteurs et leur permet de devenir des « experts rémunérés » sur la plateforme ibbü.

 

 

Le community manager d’une organisation touristique est aujourd’hui le catalyseur d’un écosystème de super clients, prescripteurs de l’offre dont il fait la promotion. Il est aux premières loges :

  • Pour engager, et faire durer la discussion dans ses publications et en message privé : CM = Conversation Manager.
  • Pour fédérer, créer du lien et de la proximité grâce à des petites attentions. Relance suite à un séjour, remerciements, cadeaux virtuels, cadeaux de bienvenue…
  • Pour passer du virtuel au réel, en proposant aux fans / abonnés / clients les plus actifs de se retrouver autour d’événements, de rencontres, d’afterworks ou encore des instameets. L’instameet est d’ailleurs très pratiqué localement en France, et à juste titre : 70% des influenceurs considèrent Instagram comme leur réseau social préféré.

C’est tout un système de considération, de fidélisation et d’engagement qui doit être mis en place, en faisant converger les communautés, les clients, et les prospects dans une stratégie de Social CRM bien pensée.

On en parle ensemble vendredi 16 février à 16h avec Ludovic Dublanchet !

Nicolas de Dianous

Directeur associé  agence We Like Travel

 

Sources : eMarketer, Business Insider, Socialbakers, Reech, Olapic, L2.

 

PARTAGER
Salon e-tourisme Voyage en Multimédia Palais des Congrès de Saint-Raphaël 14/15/16 février 2018